• Portrait

    Jean Leymarie est pour moi un de ces poètes que la modestie naturelle et l’'amour des humains et de leurs œoeuvres a conduit à n’'écrire que comme un passeur du nom des artistes.
    Ce qui lui permit d'’échapper instinctivement aux pièges que tend l’'ego si puissant chez les créateurs. Ce qui fait que son nom ne soulève pas les passions des foules en s’'étalant à la une des médias mais génère une dévotion tendre chez les quelques heureux de l’'avoir rencontré sur les chemins de l’'admiration d’'un peintre ou d’'un poète.

    Ce paysan du Lot au sourire de sphinx compréhensif savait parler des peintres et des sculpteurs comme personne, les rendant aussi simples, familiers et nécessaires qu'’une poignée de main ou un morceau de pain. C’est parce qu'’il était poète et qu'’il les aimait que les créateurs partageaient avec lui leurs questions et leurs sentiments comme des femmes amoureuses se confient à leur meilleure amie.

    C’est parce qu'’il était modeste et madré paysan qu'’il pouvait se faire le messager entre Malraux et Picasso pour mener à bien la fameuse exposition, tel Hermès entre Apollon et Dionysos. Admirateur clairvoyant de l’'un et de l’'autre, il sût les charmer tous deux bien avant cet épisode, et tous deux savaient pouvoir compter sur lui pour parler d'’eux dans leur meilleure part.

    Il pouvait à la fois respecter et enrichir la part de savoir rigoureux nécessaire à toute contribution à l’'histoire de l’art et y faire souffler le vent de l’'esprit et de l’'émotion sans lesquels toute analyse n’'est qu’'une autopsie.
    Ce souffle lui venait de son commerce avec l’œ'oeuvre, de sa connaissance de l’'artiste lorsque celui-ci était vivant ; mais avait-il d’'abord connu l’œ'oeuvre ou son auteur ? Je crois que, profondément, les deux se confondaient dans son cœoeur, moteur de son intelligence. Même si, effectivement, un auteur n'’est pas systématiquement à l'’image, voire à la hauteur de son œoeuvre, aux yeux de l’'âme ou du coeœur ils se rejoignent enfin.
    Jean Leymarie avait ces yeux-là, perçant à jour les sombres voiles dont se masque souvent le coeœur des hommes et de leurs œoeuvres.
    Cette clairvoyance aimante ne retenait pas les obscures scories qui encombrent tout cœoeur humain. Et sa face chérubine était vrillée de ces yeux pénétrants (comme dans son portrait par Picasso) que son sourire charmeur adoucissait d’'un velours sombre et doré comme la palette de Rembrandt.

    Jean Leymarie aimait les artistes et leur a donné son chant pour l’'éternité des hommes de coeœur.

    Raphaël Loison

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